ACTU-NEWS - Avril 2023

Intelligence artificielle, ChatGPT, Midjourney… Voyons le verre à moitié plein !

Les générateurs de contenu basés sur de l’intelligence artificielle font la une de l’actualité :

allez-vous choisir le camp des sceptiques ou celui des optimistes ?

ChatGPT suit le cycle classique des nouvelles technologies

 

Dans la presse tech, nous n’avions pas vu un sujet aussi fort depuis bien longtemps. La vague des DALL-E, ChatGPT, Midjourney, Sparrow et autres Chatsonic semble bien plus puissante que celle des NFT ou bien du metaverse, n’en déplaise à ses développeurs. Tel un mouvement de marées, ces sujets reviendront peut-être sur le devant de la scène. Mais aujourd’hui, tout le monde parle des outils basés sur de l’intelligence artificielle pour générer du texte, des images et des vidéos.

 

La perception de cette nouvelle technologie par les utilisateurs et les experts suit un cycle parfaitement classique – nouvelle technologie, au sens : une technologie nouvellement mise à disposition d’un nouveau cercle, ici le grand public.

 

1. D’abord, on s’émerveille de cette nouvelle technologie

 

 On est étonné des capacités de ChatGPT. On visualise d’autres horizons. On découvre de nouveaux usages. La presse s’empare du sujet, explore encore d’autres possibilités. Au-delà de la génération de texte – qui impressionne car la machine imite une conversation, et ce mode d’échange est profondément humain – on découvre que des technologies proches sont en mesure de générer toute sorte de contenu, des images, des vidéos, de la voix, de la musique, à partir d’instructions simples en langage naturel, accessibles à tous.

 

2. Puis, on déchante en découvrant ses limites

 

Plus dure sera la chute. Car après tant d’attentes, il est logique d’être déçu. À l’usage, on commence à percevoir les limites de ChatGPT. On comprend que sa base de données s’arrête en 2021. Comment ça, ce n’est même pas connecté au web ? On se rend compte des erreurs. Des biais. Des risques. ChatGPT n’est finalement pas parfait et DALL-E ne fera pas de vous le nouveau Dali.

 

3. Et on pointe du doigt les usages illégitimes

 

Dans le même esprit, on parle des mauvais usages. Les personnes malines sont souvent très rapides pour trouver des usages un peu limites de ces nouvelles technologies. Et c’est à chaque fois la même rengaine.

 

    Les étudiants vont pouvoir utiliser ChatGPT pour faire leurs devoirs et ils n’apprendront plus rien. Même si des outils de détection existent, ils arriveront à les contourner. C’est fini.

 

"Maintenant, revenez quelques années en arrière. Dans le paragraphe précédent, remplacez ChatGPT par Internet. Google. Wikipédia. On est d’accord, on a déjà entendu cela quelque part. Et pourtant… Les étudiants débrouillards, qui s’approprient ces technologies en premier, qui testent, qui font et qui défont, seront sans doute les salariés les plus curieux et les plus efficaces. Mais on préfère souvent critiquer ce qui ne constitue simplement qu’une forte capacité d’adaptation."

 

4. Enfin, la hype médiatique s’apaise

 

Dans la presse comme dans les villages et les cafés, un sujet chasse l’autre. Les espérances du début ont été ternies par des limites et des usages illégitimes. ChatGPT, ce n’est peut-être pas si terrible. Mais quand même, on va creuser : et sûrement plus doucement, en faisant moins de bruit que précédemment. Le grand public s’appropriera tranquillement certains outils. Les professionnels chercheront aussi dans quels cas précis ces technologies peuvent leur faire gagner du temps ou des résultats. La hype sera terminée, mais ChatGPT sera toujours là. À quel point ? On verra : si les nouvelles technologies suivent en général les premières étapes – tout le monde en parle, puis on déchante voire on critique, le niveau d’adoption d’une nouvelle technologie dépend de nombreux facteurs, et cela prend du temps.

La révolution n’est pas technique : c’est une révolution d’usage

 

Parmi les sorties remarquées sur ces technologies, celle de Yann Le Cun, figure française de l’intelligence artificielle – scientifique en chef de l’IA chez Meta, considéré comme l’un des inventeurs du deep learning.

 

    "ChatGPT n’est pas particulièrement innovant. Cela n’a rien de révolutionnaire, même si c’est ainsi que le public le perçoit."

 

Boom. La suite de l’échange est sur le même ton : « OpenAI n’est pas vraiment en avance sur les autres laboratoires […]. « L’apprentissage auto-supervisé est quelque chose que je préconise depuis longtemps, avant même qu’OpenAI n’existe ». Suite à sa déclaration, le chercheur a légèrement nuancé sa position, indiquant sur Twitter qu’il ne critiquait pas le travail et les déclarations d’OpenAI mais qu’il essayait de corriger une perception du public et des médias, qui voient ChatGPT comme une percée technologique incroyablement nouvelle, innovante et unique, bien en avance sur tout le monde… Alors que ce n’est pas le cas.

 

Nous ne pouvons évidemment pas critiquer les propos de Yann Le Cun sur le degré de complexité technologique des outils d’OpenAI par rapport à ceux des autres acteurs de l’intelligence artificielle. Ni ceux sur l’intérêt, ou non, des géants comme Google ou Meta de diffuser des technologies génératives à grande échelle.

 

En revanche, force est de constater une chose : ChatGPT aura permis à un très grand nombre de personnes d’accéder à une technologie où l’intelligence artificielle est particulièrement visible. Ils auront pu, d’eux-mêmes, découvrir des possibilités, de nouveaux horizons, faire des découvertes. Apprécier le résultat d’une image générée par Midjourney. Ou la déclinaison de leur photo de profil par d’autres outils assimilés. Le grand public utilise des technologies basées sur l’IA au quotidien sans trop s’en rendre compte. Mais avec ces nouveaux services, ils perçoivent et apprécient instantanément un résultat. ChatGPT aura fait sortir l’intelligence artificielle des labos et des codes sources. Et c’est bien.

 

    "ChatGPT n’est peut-être pas une révolution technologique, mais c’est une révolution d’usage. OpenAI n’a pas inventé l’intelligence artificielle, tout comme Apple n’a pas inventé le smartphone. Mais à la question « pouvez-vous citer le 1er smartphone », la majorité répondra l’iPhone. Personne ne parlera du Simon d’IBM ou du GS88 d’Ericsson."

Apprécions l’élan créatif propulsé par ces nouveaux outils

 

Chez les professionnels du digital et ceux de la création, l’arrivée de ces nouvelles technologies – ou plus précisément donc, l’arrivée de ces nouveaux outils basés sur de l’intelligence artificielle – est un bouleversement.

 

Mais Midjourney ne remplacera pas les créatifs : il permettra simplement à des personnes pleines d’idées, mais qui n’ont pas les compétences liées à la réalisation de leurs projets, d’accéder à des résultats qui n’étaient pas accessibles jusqu’alors. ChatGPT ne remplacera pas non plus les rédacteurs, malgré ce qu’on peut lire sur certains communiqués : mais il facilitera l’accès à l’information, la création de structures ou la génération de bases pour les contenus à faible valeur ajoutée.

 

L’arrivée de ces outils relance ainsi un certain esprit de découverte, de recherches, de tests. On explore, on cherche à comprendre, on visualise de nouveaux horizons pour nos métiers. Il y aura des abus, des erreurs et sans aucun doute quelques pénalités Google. Nous pouvons voir le verre à moitié vide, porter notre regard sur ces glissements. Mais il y aura aussi des corrections, des ajustements, des usages équilibrés, pertinents, des applications intéressantes, des gains de productivité et des apprentissages bienvenus. Et surtout : ces outils auront su insuffler à nouveau cet esprit d’exploration qui a toujours été le fil rouge des passionnés du web. Apprécions ce moment !

 

Article de Thomas Coëffé / Publié le 26 janvier 2023 sur le blogdumoderateur.com